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Page:Fraser's Magazine for Town and Country (IA frasersmagazine24unkngoog).pdf/788

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d’objection contre l’ingérence, seulement elle ne doit pas viser le bénéfice de ceux chez lesquels vous vous ingérez ; ils ne doivent pas supposer que vous avez le moindre égard pour leur bien. Le bien d’autrui n’est pas une des choses dont vous vous souciez ; mais vous souhaitez vous immiscer, si en vous immisçant vous pouvez obtenir un gain pour vous-même ». Telle est l’interprétation obvie du discours tenu.

Il est à peine nécessaire de dire, lorsqu’on écrit à l’intention des Anglais, que ceci n’est pas ce que nos gouvernants et nos politiciens veulent dire. Leur langage n’est pas le reflet correct de leur pensée. Ils ne veulent dire qu’en partie ce qu’ils semblent dire. Ils ne veulent pas désavouer l’ingérence faite pour le bien des autres nations. Mais la deuxième partie de ce qu’expriment leurs mots, à savoir un consentement à s’ingérer s’ils peuvent ainsi promouvoir l’intérêt de l’Angleterre, n’est pas ce qu’ils veulent dire. La pensée qu’ils ont à l’esprit n’est pas l’intérêt de l’Angleterre, mais sa sécurité. Ce qu’ils diraient est qu’ils sont prêts à agir lorsque la sécurité de l’Angleterre est menacée, ou lorsqu’un de ses intérêts est mis en danger de manière hostile ou injuste. Ce n’est rien de plus que ce que font toutes les nations suffisamment fortes pour se défendre elles-mêmes, et nul ne remet ce droit en question. C’est le droit universel de légitime défense. Mais si nous voulons dire cela, pourquoi, pour l’amour du ciel, saisissons-nous toutes les occasions possibles pour dire au lieu de cela, une chose excessivement différente ? La signification que les étrangers lisent dans les mots que nous employons n’est pas la légitime défense, mais l’ambition. Les étrangers pensent que le but dans lequel nous réclamons la liberté de nous ingérer chez eux et de nous mêler de leurs affaires n’est pas simplement la protection de ce que nous avons — et ce uniquement contre les procédés injustes et sans disqualifier la concurrence loyale, mais l’accumulation sans limites. Si nos actions rendent impossible même à l’observateur le plus partial de croire que nous visons ou que nous sommes prêts à accepter des monopoles commerciaux d’une sorte ou d’une autre, cela n’a pas d’autre effet sur leurs esprits que de leur faire imaginer que nous avons choisi un moyen plus rusé d’aboutir à la même chose. Une opinion généralement répandue chez les politiciens continentaux, surtout ceux qui se croient particulièrement savants, est que l’existence de l’Angleterre dépend de l’acquisition incessante de nouveaux marchés pour nos manufactures ; que la recherche de ces marchés est une question de vie ou de mort pour nous ; et que nous sommes en permanence prêts à violer toutes les règles de la morale publique ou internationale lorsque l’alternative consisterait à marquer une pause dans cette course. Il serait superflu de remarquer la profonde ignorance et les idées fausses eu égard aux lois de la richesse des nations et à l’état du commerce anglais que cela présuppose : mais une telle ignorance et de telles idées fausses sont malheureusement communes sur le continent ; elles ne cèdent le pas que lentement, mais perceptiblement, devant le progrès de la raison ; et pendant encore peut-être plusieurs générations nous serons jugés sous leur influence. Est-ce trop exiger de nos hommes politiques en exercice que souhaiter qu’ils aient ces choses à l’esprit ? Est-ce servir un but valable que de nous exprimer comme si nous n’avions aucun scrupule à proclamer des principes que non seulement nous aurions scrupule à mettre en œuvre, mais dont la simple idée ne nous vient jamais à l’esprit ? Pourquoi faudrait-il renoncer à dire le caractère que nous pouvons de bon droit revendiquer, qui est d’être la nation la plus incomparablement consciencieuse dans son action nationale ? De tous les pays qui sont suffisamment puissants pour être capable d’être dangereux pour leurs voisins, nous sommes peut-être le seul que de simples scrupules de la conscience suffiraient pour l’en dissuader. Nous sommes le seul peuple parmi lequel dans aucune classe de la société il n’est considéré que l’intérêt ou la gloire de la nation peut excuser un acte injuste, le seul qui considère avec jalousie et suspicion, et une propension à la critique hostile, précisément les actes de son gouvernement qui dans d’autres pays sont assurés d’être salués par des applaudissements, ceux par lesquels un territoire a été acquis, ou l’influence politique étendue. Étant en réalité meilleurs que les autres nations, au moins dans la partie négative de la morale internationale, cessons, dans les discours que nous faisons, de nous représenter comme étant pires !

Mais si nous devrions être plus prudents dans l’utilisation du