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Page:Freud - Introduction à la psychanalyse (trad. Jankélévitch), 1923.djvu/106

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expliquer cette existence. Pourquoi la vie psychique ne s’endort-elle pas ? Sans doute, parce que quelque chose s’oppose à son repos. Des excitations agissent sur elle, auxquelles elle doit réagir. Le rêve exprimerait donc le mode de réaction de l’âme, pendant l’état de sommeil, aux excitations qu’elle subit. Nous apercevons ici une voie d’accès à la compréhension du rêve. Nous pouvons rechercher quelles sont, dans les différents rêves, les excitations qui tendent à troubler le sommeil et auxquelles le dormeur réagit par des rêves. Nous aurons ainsi dégagé le premier caractère commun à tous les rêves.

Existe-t-il un autre caractère commun ? Certainement, mais il est beaucoup, plus difficile à saisir et à décrire. Les processus psychologiques du sommeil diffèrent tout à fait de ceux de l’état de veille. On assiste dans le sommeil à beaucoup d’événements auxquels on croit, alors qu’il ne s’agit peut-être que d’une excitation qui nous trouble. On voit surtout des images visuelles qui peuvent parfois être accompagnées de sentiments, d’idées, d’impressions fournis par des sens autres que la vue, mais toujours et partout ce sont les images qui dominent. Aussi la difficulté de raconter un rêve vient-elle en partie de ce que nous avons à traduire des images en paroles. Je pourrais vous dessiner mon rêve, dit souvent le rêveur, mais je ne saurais le raconter. Il ne s’agit pas là, à proprement parler, d’une activité psychique réduite, comme l’est celle du faible d’esprit à côté de celle de l’homme de génie : il s’agit de quelque chose de qualitativement différent, sans qu’on puisse dire en quoi la différence consiste. G.-Th. Fechner formule quelque part cette supposition que la scène sur laquelle se déroulent les rêves (dans l’âme) n’est pas celle des représentations de la vie éveillée. C’est une chose que nous ne comprenons pas, dont nous ne savons que penser ; mais cela exprime bien cette impression d’étrangeté que nous laissent la plupart des rêves. La comparaison de l’activité qui se manifeste dans les rêves, avec les effets obtenus par une main inexperte en musique, ne nous est plus ici d’aucun secours, parce que le clavier touché par cette main rend toujours les mêmes sons, qui n’ont pas besoin d’être mélodieux, toutes les fois que le hasard fera promener la main sur ses touches. Ayons bien présent à