Page:Freud - Introduction à la psychanalyse (trad. Jankélévitch), 1923.djvu/251

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peuvent plus être considérées comme rationnelles et explicables par la vie éveillée.

Pour illustrer les rapports existant entre les restes diurnes et le désir inconscient, je m’étais servi d’une comparaison que je ne puis que reproduire ici. Chaque entreprise a besoin d’un capitaliste subvenant aux dépenses et d’un entrepreneur ayant une idée et sachant la réaliser. C’est le désir inconscient qui, dans la formation d’un rêve, joue toujours le rôle du capitaliste ; c’est lui qui fournit l’énergie psychique nécessaire à cette formation. L’entrepreneur est représenté ici par le reste diurne qui décide de l’emploi de ces fonds, de cette énergie. Or, dans certains cas, c’est le capitaliste lui-même qui peut avoir l’idée et posséder les connaissances spéciales qu’exige sa réalisation, de même que dans d’autres cas, c’est l’entrepreneur lui-même qui peut posséder les capitaux nécessaires pour mener à bien l’entreprise. Ceci simplifie la situation pratique, tout en rendant plus difficile sa compréhension théorique. Dans l’économie politique, on décompose toujours cette personne unique, pour l’envisager séparément sous l’aspect du capitaliste et sous celui de l’entrepreneur ; ce que faisant on rétablit la situation fondamentale qui a servi de point de départ à notre comparaison. Les mêmes variations, dont je vous laisse libres de suivre les modalités, se produisent lors de la formation de rêves.

Nous ne pouvons pas, pour le moment, aller plus loin, car vous êtes sans doute depuis longtemps tourmentés par une question qui mérite d’être enfin prise en considération. Les restes diurnes, demandez-vous, sont-ils vraiment inconscients dans le même sens que le désir inconscient, dont l’intervention est nécessaire pour les rendre aptes à provoquer un rêve ? Rien de plus fondé que cette question. En la posant, vous prouvez que vous voyez juste, car là est le point saillant de toute l’affaire. Eh bien, les restes diurnes ne sont pas inconscients dans le même sens que le désir inconscient. Le désir fait partie d’un autre inconscient, de celui que nous avons reconnu comme étant d’origine infantile et pourvu de mécanismes spéciaux. Il serait d’ailleurs indiqué de distinguer ces deux variétés d’inconscient en donnant à chacune une désignation spéciale. Mais nous attendrons pour le faire,