Page:Freud - Introduction à la psychanalyse (trad. Jankélévitch), 1923.djvu/271

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Je n’arrive pas à bien comprendre cette attitude de nos adversaires. Elle tient peut-être au fait que les médecins répugnent à entrer en relations trop étroites avec leurs patients atteints de névroses et que, ne prêtant pas une attention suffisante à ce que ceux-ci leur disent, ils se mettent dans l’impossibilité de tirer de leurs communications des renseignements précieux et de faire sur leurs malades des observations susceptibles de servir de point de départ à des déductions d’ordre général. Je vous promets, à cette occasion, de me livrer, au cours des leçons qui vont suivre, aussi peu que possible à des discussions polémiques, surtout avec tel ou tel auteur en particulier. Je ne crois pas à la vérité de la maxime qui proclame que la guerre est mère de toutes choses. Cette maxime me paraît être un produit de la sophistique grecque et pécher, comme celle-ci, par l’attribution d’une valeur exagérée à la dialectique. J’estime, quant à moi, que ce qu’on appelle la polémique scientifique est une œuvre tout à fait stérile, d’autant plus qu’elle a toujours une tendance à revêtir un caractère personnel. Je pouvais me vanter, jusqu’à il y a quelques années, de n’avoir usé des armes de la polémique que contre un seul savant (Löwenfeld, de Munich), avec ce résultat que d’adversaires, nous sommes devenus amis et que notre amitié se maintient toujours. Et comme je n’étais pas sûr d’arriver toujours au même résultat, je m’étais longtemps gardé de recommencer l’expérience.

Vous pourriez croire qu’une pareille répugnance pour toute discussion littéraire atteste soit une impuissance devant les objections, soit un extrême entêtement ou, pour me servir d’une expression de l’aimable langage scientifique courant, un « fourvoiement ». À quoi je vous répondrais que lorsqu’on a, aux prix de pénibles efforts, acquis une conviction, on a aussi, jusqu’à un certain point, le droit de vouloir la maintenir envers et contre tout. Je tiens d’ailleurs à ajouter que sur plus d’un point important j’ai, au cours de mes travaux, changé, modifié ou remplacé par d’autres certaines de mes opinions et que je n’ai jamais manqué de faire de ces variations une déclaration publique. Et quel fut le résultat de ma franchise ? Les uns n’ont eu aucune connaissance de corrections que j’ai introduites et me