Page:Freud - Introduction à la psychanalyse (trad. Jankélévitch), 1923.djvu/346

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

c’est-à-dire sur le problème qui forme le fond de la question posée par le sphinx thébain, et cet intérêt est le plus souvent éveillé par la crainte égoïste que suscite la venue d’un nouvel enfant. La réponse à l’usage de la nursery, c’est-à-dire que c’est la cigogne qui apporte les enfants, est accueillie, plus souvent qu’on ne le pense, avec méfiance, même par les petits enfants. L’impression d’être trompé par les grandes personnes contribue beaucoup à l’isolement de l’enfant et au développement de son indépendance. Mais l’enfant n’est pas à même de résoudre ce problème par ses propres moyens. Sa constitution sexuelle encore insuffisamment développée oppose des limites à sa faculté de connaître. Il admet d’abord que les enfants viennent à la suite de l’absorption avec la nourriture de certaines substances spéciales, et il ignore encore que seules les femmes sont susceptibles d’avoir des enfants. Il apprend ce fait plus tard et relègue dans le domaine des contes l’explication qui fait dépendre la venue d’enfants de l’absorption d’une certaine nourriture. Devenu un peu plus grand, l’enfant se rend compte que le père joue un certain rôle dans l’apparition de nouveaux enfants, mais il est encore incapable de définir ce rôle. S’il lui arrive de surprendre par hasard un acte sexuel, il y voit une tentative de violence, un corps à corps brutal : fausse conception sadique du coït. Toutefois, il n’établit pas immédiatement un rapport entre cet acte et la venue de nouveaux enfants. Et alors même qu’il aperçoit des traces de sang dans le lit et sur le linge de sa mère, il y voit seulement une preuve des violences auxquelles se serait livré son père. Plus tard encore, il commence bien à soupçonner que l’organe génital de l’homme joue un rôle essentiel dans l’apparition de nouveaux enfants, mais il persiste à ne pas pouvoir assigner à cet organe d’autre fonction que celle d’évacuation d’urine.

Les enfants sont dès le début unanimes à croire que la naissance de l’enfant se fait par l’anus. C’est seulement lorsque leur intérêt se détourne de cet organe qu’ils abandonnent cette théorie et la remplacent par celle d’après laquelle l’enfant naîtrait par le nombril qui s’ouvrirait à cet effet. Ou encore ils situent dans la région sternale, entre les deux seins, l’endroit où l’enfant nouveau-né