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Page:Freud - Introduction à la psychanalyse (trad. Jankélévitch), 1923.djvu/429

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a pu arriver à l’idée que c’est l’acte de la naissance qui constitue la source et le prototype de l’état affectif caractérisé par l’angoisse. L’idée est aussi peu spéculative que possible ; j’y suis plutôt arrivé en puisant dans la naïve pensée du peuple. Un jour — il y a longtemps de cela ! — que nous étions réunis, plusieurs jeunes médecins des hôpitaux, au restaurant autour d’une table, l’assistant de la clinique obstétricale nous raconta un fait amusant qui s’était produit au cours du dernier examen de sages-femmes. Une candidate, à laquelle on avait demandé ce que signifie la présence de méconium dans les eaux pendant le travail d’accouchement, répondit sans hésiter : « que l’enfant éprouve de l’angoisse ». Cette réponse a fait rire les examinateurs qui ont refusé la candidate. Quant à moi, j’avais, dans mon for intérieur, pris parti pour celle-ci et commencé à soupçonner que la pauvre femme du peuple avait eu la juste intuition d’une relation importante.

Pour passer à l’angoisse des nerveux, quelles sont les nouvelles manifestations et les nouveaux rapports qu’elle présente ? Il y a beaucoup à dire à ce sujet. Nous trouvons, en premier lieu, un état d’angoisse général, une angoisse pour ainsi dire flottante, prête à s’attacher au contenu de la première représentation susceptible de lui fournir un prétexte, influant sur les jugements, choisissant les attentes, épiant toutes les occasions pour se trouver une justification. Nous appelons cet état « angoisse d’attente » ou « attente anxieuse ». Les personnes tourmentées par cette angoisse prévoient toujours les plus terribles de toutes les éventualités, voient dans chaque événement accidentel le présage d’un malheur, penchent toujours pour le pire, lorsqu’il s’agit d’un fait ou événement incertain. La tendance à cette attente de malheur est un trait de caractère propre à beaucoup de personnes qui, à part cela, ne paraissent nullement malades on leur reproche leur humeur sombre, leur pessimisme mais l’angoisse d’attente existe régulièrement et à un degré bien prononcé dans une affection nerveuse à laquelle j’ai donné le nom de névrose d’angoisse et que je range parmi les névroses actuelles.

Une autre forme de l’angoisse présente, au contraire de celle que je viens de décrire, des attaches plutôt psychiques