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Page:Freud - Introduction à la psychanalyse (trad. Jankélévitch), 1923.djvu/44

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dans un état normal vous tous les rapports, et que c’est seulement après coup, à la suite précisément de l’acte manqué, qu’on attribue à ces personnes une surexcitation qu’elles se refusent à admettre. C’est une affirmation un peu simpliste que celle qui prétend que l’augmentation de l’attention assure l’exécution adéquate d’une fonction, tandis qu’une diminution de l’attention aurait un effet contraire. Il existe une foule d’actions qu’on exécute automatiquement ou avec une attention insuffisante, ce qui ne nuit en rien à leur précision. Le promeneur, qui sait à peine où il va, n’en suit pas moins le bon chemin et arrive au but sans tâtonnements. Le pianiste exercé laisse, sans y penser, retomber ses doigts sur les touches justes. Il peut naturellement lui arriver de se tromper, mais si le jeu automatique était de nature à augmenter les chances d’erreur, c’est le virtuose dont le jeu est devenu, à la suite d’un long exercice, purement automatique, qui devrait être le plus exposé à se tromper. Nous voyons, au contraire, que beaucoup d’actions réussissent particulièrement bien lorsqu’elles ne sont pas l’objet d’une attention spéciale, et que l’erreur peut se produire précisément lorsqu’on tient d’une façon particulière à la parfaite exécution, c’est-à-dire lorsque l’attention se trouve plutôt exaltée. On peut dire alors que l’erreur est l’effet de l’« excitation ». Mais pourquoi l’excitation n’altérerait-elle pas plutôt l’attention à l’égard d’une action à laquelle on attache tant d’intérêt ? Lorsque, dans un discours important ou dans une négociation verbale, quelqu’un fait un lapsus et dit le contraire de ce qu’il voulait dire, il commet une erreur qui se laisse difficilement expliquer par la théorie psychophysiologique ou par la théorie de l’attention.

Les actes manqués eux-mêmes sont accompagnés d’une foule de petits phénomènes secondaires qu’on ne comprend pas et que les explications tentées jusqu’à présent n’ont pas rendus plus intelligibles. Lorsqu’on a, par exemple, momentanément oublié un mot, on s’impatiente, on cherche à se le rappeler et on n’a de repos qu’on ne l’ait retrouvé. Pourquoi l’homme à ce point contrarié réussit-il si rarement, malgré le désir qu’il en a, à diriger son attention sur le mot qu’il a, ainsi qu’il le dit lui-même, « sur le bout de la langue » et qu’il reconnaît