Page:Freud - Introduction à la psychanalyse (trad. Jankélévitch), 1923.djvu/445

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


Chapitre XXVI
LA THÉORIE DE LA LIBIDO ET LE « NARCISSISME »


À plusieurs reprises, et tout récemment encore, nous avons eu à distinguer entre les tendances du moi et les tendances sexuelles. Le refoulement nous avait tout d’abord montré qu’une opposition peut s’élever entre les unes et les autres, opposition à la suite de laquelle les tendances sexuelles subissent une défaite formelle et sont obligées de se procurer satisfaction par des détours régressifs : indomptables, au fond, elles trouvent dans leur indomptabilité même une compensation à leur défaite. Nous avons vu ensuite que les deux groupes de tendances se comportent différemment vis-à-vis de cette grande éducatrice qu’est la nécessité, de sorte qu’ils suivent des voies de développement différentes et affectent avec le principe de réalité des rapports différents. Nous avons enfin cru constater que les tendances sexuelles se rattachent plus étroitement que les tendances du moi à l’état affectif du moi, résultat qui sur un seul point important apparaît encore comme incomplet. Aussi citerons-nous à l’appui de ce résultat le fait digne d’être noté que la non-satisfaction de la faim et de la soif, ces deux instincts de conservation les plus élémentaires, n’est jamais suivie de la transformation de ces instincts en angoisse, alors que nous savons que la transformation en angoisse de la libido insatisfaite est un des phénomènes les plus connus et les plus fréquemment observés.

Notre droit de faire une distinction entre les tendances du moi et les tendances sexuelles est donc incontestable. Nous tirons ce droit de l’existence même de l’instinct sexuel comme activité particulière de l’individu. On peut seulement demander quelle importance et quelle profondeur nous attribuons à cette distinction. Mais