Page:Freud - Introduction à la psychanalyse (trad. Jankélévitch), 1923.djvu/478

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sublimer le transfert et le modeler jusqu’à le rendre en quelque sorte viable ; d’autres le manifestent sous une forme brute, primitive, le plus souvent impossible. Mais, au fond, il s’agit toujours du même phénomène, ayant la même origine.

Avant de nous demander où il convient de situer ce fait nouveau, permettez-moi de compléter sa description. Comment les choses se passent-elles dans les cas où les patients appartiennent au sexe masculin ? On pourrait croire que ceux-ci échappent à la fâcheuse intervention de la différence sexuelle et de l’attraction sexuelle. Eh bien, ils n’y échappent pas plus que les patientes femmes. Ils présentent le même attachement pour le médecin, ils se font la même idée exagérée de ses qualités, ils prennent une part aussi vive à tout ce qui le touche et sont jaloux, tout comme les femmes, de tous ceux qui l’approchent dans la vie. Les formes sublimées du transfert d’homme à homme sont d’autant plus fréquentes et les exigences sexuelles directes d’autant plus rares que l’homosexualité manifeste joue chez l’individu dont il s’agit un rôle moins important par rapport à l’utilisation des autres facteurs constitutifs de l’instinct. Chez ses patients mâles, le médecin observe aussi plus souvent que chez les femmes une forme de transfert qui, à première vue, paraît en contradiction avec tout ce qui a été décrit jusqu’à présent : le transfert hostile ou négatif.

Notons tout d’abord que le transfert se manifeste chez le patient dès le début du traitement et représente pendant quelque temps le ressort le plus solide du travail. On ne s’en aperçoit pas et on n’a pas à s’en préoccuper, tant que son action s’effectue au profit de l’analyse poursuivie en commun. Mais dès qu’il se transforme en résistance, il appelle toute l’attention, et l’on constate que ses rapports avec le traitement peuvent changer sur deux points différents et opposés en premier lieu, l’attitude de tendresse devient tellement forte, les signes de son origine sexuelle deviennent tellement nets qu’elle doit provoquer contre elle une résistance interne ; en deuxième lieu, il peut s’agir d’une transformation de sentiments tendres en sentiments hostiles. D’une façon générale, les sentiments hostiles apparaissent en effet plus tard que les sentiments tendres derrière lesquels ils se dissimulent ;