Page:Freud - Psychopathologie de la vie quotidienne, trad. Jankélévitch, 1922.djvu/135

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« Voici quelle était cette association : dans la famille de mon mari on a six doigts aux pieds.

« Six orteils constituent une certaine anomalie ; un enfant qui a six doigts est donc un enfant anormal et deux fois six (douze) doigts font deux enfants anormaux.

« Tel est en effet le cas de cette dame.

« Mariée jeune, elle a eu de son mari, qui était un homme excentrique, anormal et qui se suicida peu d’années après le mariage, deux enfants que plusieurs médecins ont reconnus comme ayant une hérédité chargée et comme étant anormaux.

« La fille aînée vient de rentrer à la maison, après un grave accès catatonique ; peu de temps après, la plus jeune, à l’âge de la puberté, se trouve atteinte à son tour d’une grave névrose.

« Le fait que l’état anormal des enfants se trouve rapproché du souhait de mort à l’égard de l’oncle, pour se fondre avec cet élément plus fortement refoulé et possédant une valence psychique plus grande, nous permet d’entrevoir dans le souhait de mort à l’égard de ces enfants anormaux une autre cause déterminante du lapsus.

« L’importance prédominante du chiffre douze, au point de vue du souhait de mort, ressort encore du fait que, dans la représentation de la dame, l’anniversaire de l’oncle est étroitement associé à l’idée de la mort. Son mari s’était suicidé le 13, donc le lendemain de l’anniversaire du même oncle, dont la femme a dit à celle qui était devenue si subitement veuve : « Et dire qu’hier encore, en venant présenter ses vœux, il était si cordial et aimable ; tandis qu’aujourd’hui !… »

« J’ajouterai encore que la dame avait plus d’une raison réelle de souhaiter la mort des enfants qui ne lui procuraient aucune joie, mais étaient pour elle une source de chagrins et une cause de contrainte, puisque leur présence lui imposait un veuvage obliga-