Page:Friedrich Carl von Savigny - Traité de droit romain, Tome 1, 1855.djvu/135

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quoique chacun soit libre de critiquer ces travaux, quoique l’unanimité des auteurs n’ôte à personne l’indépendance de son jugement, il y a néanmoins, parmi les fonctionnaires chargés d’appliquer le droit, une classe nombreuse et respectable qui, sans être au-dessous de leur office, sont incapables de juger une doctrine nouvelle, et de se former une opinion par eux-mêmes. Rien donc de plus naturel et même de plus désirable que de voir ces fonctionnaires suivre exclusivement l’opinion des auteurs, non dans l’intérêt de leur commodité, mais dans l’intérêt même de la sûreté du droit. Elle serait fort compromise si le juge qui n’a pu faire des études approfondies voulait avoir une opinion personnelle sur chaque question de droit, et il est très-probable que sa décision se ressentirait de l’insuffisance de ses éléments. Le juge court néanmoins un danger, celui de se laisser entraîner trop facilement par l’apparence d’une doctrine nouvelle, au détriment de la justice[1]. Mais si parmi les magistrats se trouve un véritable jurisconsulte, sans doute il a bien le droit d’appliquer à l’administration de la justice la sagesse et la maturité de ses convictions.

Mais à quel signe reconnaître la présence de

  1. Sur la nature et l’importance de l’autorité doctrinale pour la juridiction, voy. un excellent morceau de Möser, Patriotische Fantasien, I, N. 22.