Page:Friedrich Carl von Savigny - Traité de droit romain, Tome 1, 1855.djvu/250

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légitimité. Cette opération n’est donc pas restreinte, comme plusieurs le pensent, au cas accidentel d’obscurité dans la loi (§ 50) ; mais elle peut alors prendre plus d’importance, et avoir des conséquences plus étendues. L’obscurité est. une imperfection de la loi, et, pour en chercher le remède, il faut d’abord l’étudier à son état normal.

D’un autre côté, quelle que soit l’obscurité de la loi, la nécessité de l’opération intellectuelle n’en subsiste pas moins[1]. Aussi devons-nous poser en principe que le juge, par la nature de ses fonctions, est tenu de donner un sens à la loi, la plus obscure, et d’y conformer son jugement. De même, les faits d’un procès peuvent offrir la plus grande incertitude ; mais cela ne dispense pas le juge de se prononcer. Entre les deux éléments d’un jugement, la règle de droit et le fait, il n’y a pas sous ce rapport de différence essentielle. La disposition du droit français qui défend au juge de s’abstenir, sous prétexte du silence ou de l’obscurité de la loi[2], est fondée sur la nature même des fonctions judiciaires. Il est un cas cependant où la liberté d’interprétation se trouve enchaînée, c’est quand le

  1. On verra plus bas comment cette opinion s’accorde avec les prescriptions du droit Justinien. Voy. § 48.
  2. Code civil, art. 4.