Mon cœur possédait des extases infinies ;
Des vents mystérieux tout chargés d’harmonies
Lointaines jour et nuit flottaient sur des sommets
De splendeurs, langoureux, doux et tels que jamais
Homme n’en entendit de pareils ; et les branches
Des arbres frémissaient comme des lyres blanches.
Je me souviens d’avoir autrefois habité
Ce pays magnifique où fleurît la beauté
Des Sirènes ; j’ai vu ces femmes idéales
Se promener parmi les rougeurs boréales,
Abandonnant leurs chevelures aux rayons
Des étoiles ! j’ai vu tout ce que nous voyons
En rêve ; mais tandis que le sommeil nous cache
La moitié des splendeurs où notre amour s’attache,
Et que ce qu’aujourd’hui vivants nous contemplons,
Seins de femmes, regards célestes, cheveux blonds,
Apparaît seulement pour les yeux de nos âmes,
Moi, comme j’ai vécu parmi toutes ces femmes
Dans leur voluptueux ciel qui m’est toujours cher,
J’ai vu toutes leurs chairs avec mes yeux de chair.
Ce qui fait qu’aujourd’hui même j’y songe encore,
Et que maintenant, ivre encor de cette : aurore
Superbe tant de fois contemplée en ces temps
Évanouis, je vois en moi leurs chairs, j’entends
Page:Froger - À genoux, 1878.djvu/166
Apparence
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.