Page:Froissart - Œuvres de Froissart, Chroniques, Tome 1, 1873.djvu/478

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honorer tels gens qui ainsi mettent leurs corps en péril et travail pour les estranges choses veoir et lointains voiages faire ; et de ce faire leur soufist pour les grans choses estranges qu’ils y ont veues et encores ont volenté de veoir. Et vraiement c’est grant bien ; mais toutesfois di-je : ’’qui plus fait, miex vault’’.

Dont nous convient parler encore d’un autre estat de gens d’armes qui moult sont à loer. Et ce sont ceulx qui par plusieurs nécessités qui ne sont à ramentevoir, se partent de leur païs ou pour profit qu’il pensent à avoir plus grant qu’il n’auroient ou pouroient avoir en leur pays-mesmes, et par ceste manière se partent de leur pays avant qu’il soit nul compte d’eulx par nul fait d’armes, et plus volontiers demorassent en leur pays, se il peussent bonnement. Mais toutesfois s’en partent et vont en Lombardie ou en Touscane, en Puille ou ès autres pays là où l’en donne souls et gaiges, et là se demeurent et se mettent en estat de chevaux et d’armeures, parmy les sols et les gaiges qu’ils reçoivent. Et par ce pèvent-il veoir, aprendre et savoir moult de biens pour le fait de la guerre ; car ils pèvent estre en tels païs ou marches là où il pèvent veoir et faire en fait d’armes moult de biens. Et plusieurs fois a Nostre-Seigneur donné grâce à plusieurs qui sont alés en la manière que j’ay dessus dite, tant de la renommée des grants biens qu’ils y ont fais de leurs corps et de leur main ès bons fais d’armes où il se sont trouvés, comme de proffiter avecques l’onneur. Et quant Dieu leur a donné tel grâce d’onnour pour leurs bons fais en ce mestier, icelles gens sont à loer et honnorer partout, mais que il ne délaissent mie pour leur proffit trop tost du continuer ; car qui trop tost le délaisse, de Iégier s’abaisse de renommée, et nuls ne se doit délaissier de bien faire, que quant le corps ne peut plus : si doit avoir le cuer et la bonne volenté. Et à moult de gens est-il miex cheu et avenu à la fin que ils n’avoient espérance à leur encommencement selon la manière de leur emprise. Et pour ce di-je : ’’que qui miex fait, miex vault’’.