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LIVRE III.

donnoient pleine puissance de hériter qui que le duc de Bretagne vouloit.

Quand les lettres furent escriptes et scellées du tout à l’intention du duc et sans rappel[1], le sire de Beaumanoir fut ordonné de par le connétable pour aller aux chastels et pour faire partir et issir ceux qui les tenoient et avoient tenus toujours au nom du connétable et pour mettre en

  1. Les conventions conclues entre Olivier Cliçon et le duc de Bretagne sont de la teneur suivante :

    « C’est la forme du traité fait et parlé entre très noble et puissant prince Jehan, duc de Bretaigne, et noble homme Olivier, sire de Cliçon. Sur ce que monseigneur le duc disoit le dit sire de Cliçon avoir commis et perpétré plusieurs extorsions, rebellions et désobéissances, et autres malversations contre lui et l’état de sa personne, pour lesquelles il entendoit procéder contre le dit messire Olivier à punition de corps et privation de tous ses biens, meubles et héritages, à la supplication et requête de plusieurs nobles personnes, savoir est : le sire de Laval et de Vitré, le vicomte de Rohan, le sire de Château-Brient, le sire de Rochefort et Rieux, le sire de Montfort, et le sire de Malestroit, et plusieurs autres amis et parens du dit sire de Cliçon, ont accordé, transigé et composé en la manière qui ensuit : premièrement, toutes les forteresses du dit sire de Cliçon et celles de Jehan de Bretaigne, fils monseigneur Charles de Blois, seront présentement délivrées et rendues à mon dit sieur le duc ou à son commandement, loyaument et de fait, avec Jugon ; et cest jour de vendredi sera le chastel Jousselin rendu au sire de Malestroit, en nom de mon dit seigneur le duc ; et cest prouchain samedi dedans souleil couchant seront rendus franchement les villes et forteresses de Lamballe, de Brou, de Jugon et de Blain ; et dedans dimanche prouchain souleil couchant les villes, châteaux et forteresses de Guingamp, de la Roche-Derrien, de chastel Andreu, de Cliçon et de chastel Guy : Item, le dit chastel Guy sera abatu, et le tribut que prend le sire de Cliçon sur la rivière de Loire sera nul, et non levera ni ne fera lever jamais nul en nul endroit de la dite rivière, sauf à lui à soi lever et jouir ses rentes et anciens devoirs, comme souloient faire ses prédécesseurs. Item, le dit sire de Cliçon ne se entremettra jamais au dit Jehan de Bretaigne, de ses terres, ne de sa délivrance, ne de son gouvernement, ne ne lui pourvoyra, ne autre par lui, de chevance, par prest, ne autrement, ne autre confort ne lui fera. Item, le mariage parlé du dit Jehan et de la fille du dit sire de Cliçon sera nul et ne se fera jamais, et les alliances d’entrieux seront nulles. Item, renoncie et cède dès présent le dit sire de Cliçon à mon dit seigneur le duc Jugon, Le Gavre, Cesson, et toutes les donations des héritages que il a eus de mon sieur le duc, à lui demourer par héritage et à ses hoirs, procréés et à procréer de son propre corps, sans ce que le dit sire de Cliçon en ait aucun retour ; et en rendra toutes les lettres faites ou titres qu’il en a eus ; et aussi cède et délaisse à mon dit seigneur le duc la terre de Guillac, à lui demourer à héritage pour lui et ses hoirs procréés comme dit est en perpétuel. Item, la ville, le chastel et la chastelenie de chasteau Jousselin, toute et la terre de Porhouet, avec leurs appartenances, demoureront à mon dit seigneur le duc et à ses hoirs procréés ou à procréer, comme dit est, à jamais ; et lui en rendra le dit sire de Cliçon tous les fais qu’il en a, et y fera assentir ses hoirs. Item, le chastel et la chastelenie de Brou demourera à mon dit seigneur le duc à en jouir son viaige. Item, paiera présentement avecques, et le jour de la rendue de chasteau Jousselin, le dit sire de Cliçon à mon dit seigneur le duc, cent mille frans d’or, à estre siens pour jamais. Item, le fouage derrainement imposé pour le fait de Brest sera présentement levé ès terres du dit sire de Cliçon, et aux autres fouages pour celui fait, et jusques à l’accomplissement de la prinse obéira, et fera son pays et ses subgets y contribuer. Item, le dit sire de Cliçon obéira à mon dit seigneur le duc et à sa justice comme subget, et jamais contre lui ne fera ne ne fera faire convocation ne assemblée des subgetz de monseigneur, fors tant seulement pour le fait du roi ; ne ne les induira ne requerra par lui ne par autres à faire grez, promesses, alliances ne confédérations ; et toutes les alliances et confédérations qu’il a à quelconques personnes que ce soit, excepté tant seulement le roi, il renonce de fait, ne jamais n’en fera nulles. Item, le dit sire de Cliçon voudra et commandera aux seigneurs de Beaumanoir, de Derval, de Rostrenen, et à tous autres ses alliés venir à monseigneur le duc dessus dit pour renoncer aux grez et promesses qu’ils lui ont faits, et à mon dit seigneur en requerront pardon. Item, mon dit seigneur le duc aura la moitié des gabelles, impositions et autres noveletés ez terres du dit sire de Cliçon et en celles de sa femme. Item, en cas que le dit sire de Cliçon feroit aucune chouse contre la forme de cest traitié, toutes ses terres, meubles et héritages seront confisqués, et demoureront à mon dit seigneur le duc et à ses hoirs procrées, comme dit est, à héritage. Item, se pour cause de ceste detemption, ou pour ce que s’en est ensuy et ensuivra, ou pour autres causes quelconques du temps passé ou à venir, le dit sire de Cliçon a aucuns subgets ou officiers de mon dit seigneur le duc en indignation ou malegrace, jà pour quelconque cause ou occasion que ce soit ou puisse estre, il ne leur peichera ne pourchacera aucun domage, ennui, ou empêchement, par lui, ou par autres, ains voudra leur bien sans tendre à aucune vengeance ; et ces chouses accomplies de la part du dit sire de Cliçon, ses chasteaux et terres lui seront rendus, excepté Chastel Jousselin et Brou, et les autres héritages qui par cest traité doivent demourer à mon dit seigneur le duc en la manière dessus dite. Et je, le dit Olivier sire de Cliçon et de Belleville, confesse avoir fait et fait le traité et promesses dessus dits, en la manière et selon que contenues cy devant, et icelles et chacunes, de ma pure et libérale volonté, à ma requeste, et sans pourforcement, fraude ne mal engin y penser, ay promis, juré, promets et jure à Dieu, aux saintes évangiles, par la foi et serment de mon corps, et sur l’obligation de moi, mes hoirs, et de tous mes biens présents et futurs, tenir, fournir, garder et loyaument accomplir de point en point, comme contenu est en ces présentes, sans venir encontre par moi ne par autres, en nulle manière ; et ay renuncié et renunce par ces faits à toutes exceptions qui contre la teneur de cestes lettres pourroient estre dittes, objectées, ou opposées, tant de fait, de droit, que de coustume, à toute ayde et remède de droit, establissement de pape, de roi, fait et à faire ;