Page:Fromentin - Dominique, 1863.djvu/154

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à cela, et quand il vous arrivera de vous apercevoir agissant, souffrant, aimant, vivant, si séduisant que soit le fantôme de vous-même, détournez-vous. »

« Vous vous ennuyez, dites-vous. Cela veut dire que vous souffrez : l’ennui n’est fait que pour les esprits vides et pour les cœurs qui ne sauraient être blessés de rien ; mais de quoi souffrez-vous ? Cela peut-il se dire ? Si j’étais près de vous, je le saurais. Quand vous m’aurez donné le droit de vous interroger plus positivement, je vous dirai ce que j’imagine. Si je ne me trompe pas et s’il est vrai que vous ignoriez vous-même ce qui commence à vous faire souffrir, tant mieux, c’est un signe que votre cœur a retenu toute la naïveté que votre esprit n’a plus. »

« Ne me demandez pas que je vous parle de moi ; mon moi n’est rien jusqu’à présent. Qui le connaît, excepté vous ? Il n’est vraiment intéressant pour personne. Il travaille, il s’efforce, il ne se ménage point, ne s’amuse guère, espère quelquefois, et quand même continue de vouloir. Cela suffit-il ? Nous verrons…

« J’habite un quartier qui probablement ne sera pas le vôtre, car vous aurez le droit de choisir. Tous ceux qui comme moi partent de rien pour