Page:Fromentin - Dominique, 1863.djvu/245

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— Absolument comme un ennemi.

— Et moi, reprit-elle, croyez-vous donc que j’en sois bien éprise ?

— Soit. Vous me donnez l’exemple, et je vous obéirai. »

Le soir indiqué, j’arrivai de bonne heure. Il n’y avait encore qu’un très-petit nombre d’invités réunis autour de Madeleine, près de la cheminée du premier salon. Quand elle entendit annoncer mon nom, par un élan de familiarité qu’elle ne tenait nullement à réprimer, elle fit un mouvement vers moi qui l’isola de son entourage et me la montra de la tête aux pieds comme une image imprévue de toutes les séductions. C’était la première fois que je la voyais ainsi, dans la tenue splendide et indiscrète d’une femme en toilette de bal. Je sentis que je changeais de couleur, et qu’au lieu de répondre à son regard paisible, mes yeux s’arrêtaient maladroitement sur un nœud de diamants qui flamboyait à son corsage. Nous demeurâmes une seconde en présence, elle interdite, moi fort troublé. Personne assurément ne se douta du rapide échange d’impressions qui nous apprit, je crois, de l’un à l’autre que de délicates pudeurs étaient blessées. Elle rougit un peu, sembla frissonner des épaules, comme si subitement elle avait