Page:Fromentin - Dominique, 1863.djvu/317

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un jour : Ceci sera de l’amour ! conduis-moi droit à ta Julie, et je l’épouse, sinon ne me parle plus de cette enfant qui m’est insupportable et… »

Il s’arrêta ; non pas qu’il fût à bout d’arguments, car il les choisissait au hasard dans un arsenal inépuisable, mais comme s’il eût été calmé subitement par un retour instantané sur lui-même. Rien n’égalait chez Olivier la peur de se montrer ridicule, le soin de ne dire ni trop ni trop peu, le sens rigoureux des mesures. Il s’aperçut en s’écoutant, que depuis un quart d’heure il divaguait.

« Ma parole d’honneur, s’écria-t-il, tu me rends imbécile, tu me fais perdre la tête. Tu es là devant moi avec le sang-froid d’un confident de théâtre, et j’ai l’air de te donner le spectacle d’une farce tragique. »

Puis il alla s’asseoir dans un fauteuil ; il y prit la pose naturelle d’un homme qui s’apprête non plus à pérorer, mais à discourir sur des idées légères, et changeant de ton aussi vite et aussi complètement qu’il avait changé d’allures, les yeux un peu clignotants, le sourire aux lèvres, il continua :

« Il est possible qu’un jour je me marie. Je ne le crois pas, mais, pour parler sagement, je te dirai, si tu veux, que l’avenir permet de tout admettre ; on a vu des conversions plus éton-