Page:Fromentin - Dominique, 1863.djvu/316

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— Tu déraisonnes, Olivier, lui dis-je en l’interrompant brusquement. Personne n’épie tes démarches. Personne ne conspire avec la pauvre Julie pour s’emparer de ta volonté et la lui amener pieds et poings liés. Tu veux parler de moi, n’est-ce pas ? Eh bien ! je n’ai formé qu’un vœu, c’est que Julie et toi vous vous entendissiez un jour ; j’y voyais pour elle un bonheur certain, et pour toi des chances que je ne vois nulle part ailleurs.

— Un bonheur certain pour Julie, pour moi des chances uniques ! à merveille ! Si cela pouvait être, tes conclusions seraient mon salut. Eh bien ! je te déclare encore une fois que tu te fais l’instrument du malheur de Julie, et que, pour lui épargner un mécompte, tu me rendrais un lâche criminel, et tu la tuerais. Je ne l’aime pas, est-ce assez clair ? Tu sais ce qu’on entend par aimer ou ne pas aimer ; tu sais bien que les deux contraires ont la même énergie, la même impuissance à se gouverner. Essaye donc d’oublier Madeleine, moi j’essayerai d’adorer Julie ; nous verrons lequel de nous deux y réussira le plus tôt. Retourne-moi le cœur sens dessus dessous, aie la curiosité d’y fouiller, ouvre-moi les veines, et si tu y trouves la moindre pulsation qui ressemble à de la sympathie, le moindre rudiment dont on puisse dire