Page:Fromentin - Dominique, 1863.djvu/350

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Ce mot en disait plus que tous les reproches et se planta dans mon cœur comme un coup d’épée.

« J’ai su que Julie était malade, lui dis-je sans faire aucun effort pour déguiser le tremblement de ma voix qui défaillait. J’ai su aussi que Mme de Nièvres était souffrante, et je viens vous voir. Il y a si longtemps…

— C’est vrai, reprit M. d’Orsel, il y a longtemps… La vie sépare ; chacun a ses devoirs et ses soucis… »

Il sonna, fit allumer les lampes, m’examina rapidement comme s’il eût voulu constater je ne sais quel changement en moi, analogue aux altérations profondes que ces deux années avaient produites chez ses enfants.

« Vous avez vieilli, vous aussi, reprit-il avec une sorte de bienveillance et d’intérêt tout à fait affectueux. Vous avez beaucoup travaillé, nous en avons la preuve… »

Puis il me parla de Julie, des vives inquiétudes qu’ils avaient eues, mais qui heureusement étaient dissipées depuis quelques jours. Julie entrait en convalescence, ce n’était plus qu’une affaire de soins, de ménagements et de quelques jours de repos. Il passa encore une fois d’un sujet à un autre.