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L’HOMME À L’HISPANO

Il se versa un verre de vin de Porto, et puis un second, et, coup sur coup, d’un trait, il les absorba. Il faisait passer la pilule. Calme et droite, elle le regardait. Il y eut un long temps, presque une minute, de répit. Il alluma un deuxième cigare. Tout ce qu’il avait bu dans l’après-midi et au dîner fut soudain ranimé par le vin et par la colère.

Il sentit sa griserie. Alors il s’observa. Il avait une telle habitude d’ingurgiter qu’il savait être ivre et ne pas le montrer. Mais son cerveau surexcité travaillait et l’intoxication de l’alcool lui donnait la lucidité, Enfin il ricana ;

— Alors, vous êtes prête à faire des bêtises ?

Stéphane sursauta :

— Qu’est-ce que vous dites ?

Il fit semblant de ne pas voir qu’elle s’indignait de la question, d’oublier qu’il n’avait plus aucun droit de la poser. Il continua :

— Croyez-moi : personne n’en vaut la peine.

— Vous sortez de nos conventions, dit-elle.

Pour ne pas le planter là et s’en aller, elle faisait un effort grandissant. Mais il avait pris un air paterne. Les conventions ? Il les connaissait bien ! Il répéta qu’elle était libre et que, seulement, il lui donnait un conseil. Alors, elle perdit sa sérénité et, nerveusement, lui répondit :

— Je vous conseille, moi, de me laisser tranquille. En trois ans de mariage, je n’ai appris de vous que la négation de tout. Je vous ai pré-