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NOTICE SUR FRONTIN

succéda : « Kalendis januariis in senatu, quem Julius Frontinus, præetor urbanus, vocaverat, legatis exercitibusque ac regibus, laudes gratesque decretæ… Et mox, ejurante Frontino, Cæsar Domitianus præturam cepit[1]. » Nous n’avons rien de certain sur les causes de cette abdication. Les circonstances étaient difficiles : les révoltes récentes des Gaulois et des Bataves n’étaient point apaisées ; le parti des Vitelliens remuait encore ; d’un autre côté, on craignait l’ambition du proconsul Pison, qui, gouvernant en Afrique, eût volontiers émancipé à son profit cette province, d’où le peuple romain tirait une grande partie de son approvisionnement. Frontin, sur qui pesait toute la responsabilité des affaires, puisque les consuls étaient loin de Rome, a-t-il reculé devant cette grave situation ? Ou bien a-t-il, dans le but de complaire à Vespasien, résigné ses fonctions en faveur de Domitien, second fils de l’empereur ? Ce dernier motif nous paraît le plus probable. Il est même permis de conjecturer que Domitien convoitait cette dignité : car, aussitôt que le poste fut vacant, il s’en empara, selon l’expression de Tacite ; et, au dire de Suétone[2], il se fit donner en même temps la puissance consulaire : « Honorem præturæ urbanæ cum potestate consulari suscepit. »

Tout porte à croire que quelques années après, vers 827, Frontin reçut le titre, sinon de consul ordinaire, du moins de consul remplaçant, ou subrogé (suffectus). Son nom, il est vrai, ne figure point dans les fastes ; mais on sait que de tous les consuls, dont le nombre dépendait souvent du caprice de l’empereur, les deux premiers seuls donnaient leur nom à l’année, et étaient inscrits sur ces monuments chronologiques. Élien le tacticien, contemporain de notre auteur, lui donne, dans la préface de son livre, le titre de personnage consulaire. D’ailleurs, il fut envoyé en Bretagne comme gouverneur. Or Petilius Cerialis, son prédécesseur immédiat dans ce gouvernement, et Julius Agricola, son successeur également immédiat, avaient tous deux été consuls avant d’être mis à la tête des armées romaines dans cette province[3] ; et leurs noms ne sont pas non plus dans les fastes. Il est donc naturel de penser que Frontin, avant de recevoir la même charge, avait été, lui aussi, promu à la dignité de consul[4]. Selon le calcul des chronologistes, Cerialis serait allé en Bretagne en 824, et Frontin lui aurait succédé

  1. Tacitus, Hist. lib. iv, c. 39.
  2. Vie de Domitien, ch. 1.
  3. Tacite, Vie d’Agricola, ch. viii et ix.
  4. Voyez l’opinion de Tillemont, t. ii. p. 209.