Page:Furetière - Le Roman bourgeois.djvu/342

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aucun edit ou tariffe qui ait esté publié, de sorte que, si on la portoit au marché, on mourroit bien de faim aupres. Il est vray (repliqua Charroselles) qu’elle est aujourd’huy fort decriée, avec toutes les especes legeres qu’on a ordonné de porter au billon, car il n’y a rien de plus leger que de la fumée. Il alloit là-dessus donner carriere à son esprit, et dire force méchantes pointes, estant fort grand ennemy des donneurs de loüanges ; mais il en fut empesché par Belastre, qui, ayant esté adverty par son greffier qu’il y avoit quelques interrogatoires fort pressez qu’il devoit faire en sa justice, fut obligé de quitter la partie, et de s’en aller, non sans un grand regret d’avoir esté interrompu par Volaterran, en voulant plaider son procès devant Charroselles.

Il se consola par l’esperance qu’il eut d’en trouver une autrefois l’occasion, ce qui ne luy fut pas mal-aisé, car, en continuant ses visites, il y trouva plusieurs fois aussi Charroselles, qui pour ce jour-là n’y resta gueres plus long-temps que luy. Mais je serois fort ennuyeux si je voulois décrire par le menu toutes les avantures de ces amours (c’est ainsi que je les appelle à regret, chacun les pourra nommer comme il luy plaira), car elles durerent assez long-temps, et continuerent tousjours de mesme force. Il y eut sans cesse querelles, differens et contestations, au lieu des fleurettes et des complimens qui se debitent en semblables entretiens. La seule complaisance qu’eut Charroselles pour Collantine, ce fut de luy laisser deduire tous les procès qu’elle voulut, à la charge d’entendre lire de ses ouvrages par apres en pareille quantité. Et certes, il luy rendit bien son change, ne luy ayant pas esté à son tour moins importun. Je m’abstiendray de reciter les uns et les au-