Page:Furetière - Le Roman bourgeois.djvu/343

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tres, et je croy, Dieu me pardonne, que je serois plustost souffert en recitant au long ces procès, qu’en faisant lire ces ouvrages maudits, qui sont condamnez à une prison perpetuelle.

Jugez donc du reste de l’histoire de ces trois personnages par l’échantillon que j’en ay donné ; et sans vous tenir d’avantage en suspens, voicy quelle en fut la conclusion :

À l’égard de Belastre, son procès le mina si bien avec le temps, ayant affaire à une partie qui sçavoit mieux son mestier que luy, que non seulement il se vid entierement ruiné (ce qui n’eut pas esté grand chose, car il l’estoit desja devant que d’arriver à Paris), mais mesme interdit et depossedé de sa charge, qui estoit le seul fondement de sa subsistance. Ses amys, qui prevoyoient bien cette cheute, voulurent, avant qu’elle feust arrivée, tenter les voyes d’accommodement avec Collantine, qui le pressoit le plus. Ils luy monstrerent si bien qu’il n’avoit plus que ce moyen de se maintenir, qu’ils le firent resoudre à luy faire faire des propositions de l’épouser, malgré le peu de bien qu’elle avoit. Mais l’esprit de Collantine estoit bâty de telle sorte, que cette esperance d’accommodement, qui la devoit porter à faire faire ce mariage, fut ce qui l’en empescha. Car, comme elle vint à considerer que, si-tost qu’elle seroit mariée à Belastre, il luy falloit quitter les pretentions qu’elle avoit contre luy, elle ne s’y put jamais resoudre, ni abandonner lâchement ce procès, qui estoit son plus grand favory, à cause qu’il estoit le plus gros. Cette seule pensée de paix qu’avoit euë Belastre fut cause qu’il eut tout à fait son congé ; de-