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souvenirs d’une actrice.

terai point de mon courage dans cette circonstance. J’étais fort paisible chez moi, ne me doutant de rien. Assez de malheurs réels arrivèrent sans y joindre des récits imaginaires.

Bientôt après, le public eut à s’occuper d’autre chose. On peut se faire une idée de la sensation que produisit le procès du général Moreau en 1804 ; je crois qu’il eût été dangereux de le condamner à mort. Il y avait une grande fermentation dans Paris ; les avenues du palais étaient encombrées par la foule ; et cette foule, parmi laquelle on voyait des gens distingués, des militaires de tous grades, resta toute la nuit à attendre les résultats du jugement. On se passait de bouche en bouche les nouvelles qui arrivaient de l’intérieur du palais, et elles parvenaient ainsi comme l’éclair jusqu’au point le plus éloigné. Cela rappelait le jour de la mort de Mirabeau.

Lorsqu’enfin l’on apprit que Moreau n’était condamné qu’à l’exil, on respira plus librement ; car il est à remarquer que, dans les jugements auxquels on s’intéresse aussi vivement, ce n’est que la mort