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souvenirs d’une actrice.

muscadine. J’habillai ma petite fille et la fis bien gentille : son élégance ne pouvait la compromettre. À huit heures je me rendis avec elle à la section. Tous les hommes, à l’exception des militaires, étaient en carmagnoles. J’étais fort peu en train de danser, mais il me fallut faire contre fortune bon cœur. Plus d’une dame m’envia l’honneur de danser avec le représentant, et cependant je leur aurais cédé volontiers cet honneur. Il fit beaucoup de caresses à ma fille ; sous prétexte qu’elle était fatiguée je me retirai de bonne heure. Je ne partis néanmoins qu’après qu’il eut autorisé le procureur de la commune à me délivrer un passeport. C’était un fort honnête homme que ce fonctionnaire ; il eût été à souhaiter que beaucoup d’hommes en place de ce temps lui eussent ressemblé, car il a fait tout le bien qu’il a pu, et empêché le mal, lorsque cela lui était possible. Je l’ai revu depuis avec bien du plaisir. Joseph Lebon m’avait invitée à lui faire mes adieux avant mon départ ; mais je m’en gardai bien, car je craignais qu’il ne lui vînt quelque réminiscence. Je partis le cœur navré de