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souvenirs d’une actrice.

nombre de patriotes. Le commandant prit cela pour une ruse de guerre, et se persuada que l’armée était aux portes, car autrement on ne pouvait penser qu’une poignée de jeunes gens eussent voulu tenter une attaque. Après une légère résistance, la garnison peu nombreuse met bas les armes et abandonne la citadelle. Les vainqueurs au lieu de poursuivre les troupes, s’amusent à chanter victoire et à boire à la santé des Autrichiens ; mais bientôt la garnison reconnaît son erreur. Furieuse d’avoir été trompée, elle se répand dans la ville, entre dans les maisons et massacre tout ce qu’elle rencontre. Tout ce qu’il y avait d’hommes en état de porter les armes était hors des murs ; il ne restait donc que des bourgeois sans défense. L’épouvante et le carnage deviennent horribles, chacun court sans savoir où. On vient nous dire : « sauvez-vous au théâtre, on ne pourra vous y supposer à cette heure ; fermez les portes et éteignez toutes les lumières. » C’est la première fois, je crois, que le théâtre fut un asile inviolable. Nous y restâmes toute la nuit dans des transes mortelles, car nous ignorions