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souvenirs d’une actrice.

apprenons que l’armée approche et que l’on va commencer l’assaut : jugez de notre effroi. On nous fait espérer cependant que l’on pourra sortir par la porte opposée, mais nous n’en avons pas le temps. Les premiers boulets lancés, le peuple se réunit en tumulte sur les places. Les familles se sauvent dans les caves sans avoir pu se munir des choses les plus nécessaires ; quelques personnes arrivent avec des vivres et des vêtements qu’ils ont emportés à la hâte. C’est là que j’ai vu la véritable égalité dont on nous parle si souvent ; le malheur réunit tout, rapproche les distances. Pauvre et riche s’entr’aidaient, car chacun courait les mêmes dangers, et l’on se donnait les uns aux autres les choses dont on manquait. Si l’on apportait un blessé, c’était à qui s’empresserait de le secourir ; on déchirait son linge pour étancher son sang, pour faire de la charpie. Si quelqu’un disait : « Je n’ai pas telle chose. — La voici, » répondait aussitôt un autre. Les habitants d’un hôtel qui était en feu recevaient l’hospitalité d’une pauvre famille ; des enfants, des vieillards étaient abrités dans