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héréditaires que de mâle en mâle ; il n’indique aucune règle de succession, et laisse supposer que ces sortes d’héritages étaient soumis aux règles ordinaires qui régissaient la succession des privata.

Il fallait avoir lu bien superficiellement ces deux passages pour y voir une ressemblance avec les fiefs ou les bénéfices. Il s’agit d’une donation pleine et entière ; donavit, dit Lampride ; privata donavit, dit Vopiscus. C’est l’opposé du bénéfice et du fief. Ces concessions sont héréditaires, ce que le bénéfice n’a jamais été en fait, ce que le fief n’a jamais été en droit. Rien ne montre que la succession masculine en fût une règle, comme plus tard pour le fief. Enfin, si la condition du service militaire y était attachée, cela même, loin d’être une ressemblance avec le bénéfice mérovingien, est ce qui s’en éloigne le plus ; car nous constaterons bientôt que le bénéfice, origine du fief, ne fut jamais soumis à la condition du service militaire.

Faisons le même examen sur les deux textes législatifs qui ont été allégués, en y ajoutant même une autre loi d’Honorius qui est au Code Justinien et un fragment du jurisconsulte Paul qui est au Digeste[1].

Tous ces textes se rapportent à des terres situées aux frontières, agri limitanei. On sait que les empereurs, pour défendre ces vastes frontières sans avoir besoin de trop de soldats, les avaient garnies d’une ligne de petits forts, castella, et d’un fossé, limes[2]. Les soldats qui les

  1. Code Justinien, XI, 60 (59), 2 [Code Théodosien, VII, 15, 2]. – Paul, au Digeste, XXI, 2, 11 : Possessiones (trans Rhenum) ex præcepto principali veteranis in præmia adsignatas.
  2. Spartien, Vie d’Hadrien, 12 : Per ea tempora et alias frequenter in plurimis locis, in quibus barbari non fluminibus sed limitibus dividuntur, stipitibus magnis in modum muralis sæpis funditus jactis atque annexis barbaros separavit. – Ammien Marcellin, XXVIII, 2 : Valenti-