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CH. VII. LE DROIT DE SUCCESSION.

ver aussi, à l’origine, le droit d’aînesse. Sparte le conserva plus longtemps que les autres villes grecques, parce qu’elle fut plus longtemps fidèle aux vieilles institutions ; chez elle le patrimoine était indivisible et le cadet n’avait aucune part[1]. Il en était de même dans beaucoup d’anciennes législations qu’Aristote avait étudiées ; il nous apprend en effet que celle de Thèbes prescrivait d’une manière absolue que le nombre des lots de terre restât immuable, ce qui excluait certainement le partage entre frères. Une ancienne loi de Corinthe voulait aussi que le nombre des familles fût invariable, ce qui ne pouvait être qu’autant que le droit d’aînesse empêchait les familles de se démembrer à chaque génération[2].

Chez les Athéniens, il ne faut pas s’attendre à trouver cette vieille institution encore en vigueur au temps de Démosthènes ; mais il subsistait encore à cette époque ce qu’on appelait le privilége de l’aîné[3]. Il consistait à garder, en dehors du partage, la maison paternelle ; avantage matériellement considérable, et plus considérable encore au point de vue religieux ; car la maison paternelle contenait l’ancien foyer de la famille. Tandis que le cadet, au temps de Démosthènes, allait allumer un foyer nouveau, l’aîné, seul véritablement héritier, restait en possession du foyer paternel et du tombeau des ancêtres ; seul aussi il gardait le nom de la famille[4]. C’étaient les vestiges d’un temps où il avait seul le patrimoine.

On peut remarquer que l’iniquité du droit d’aînesse,

  1. Fragments des histor. grecs, coll. Didot, t. II, p. 211.
  2. Aristote, Polit., II, 9 ; II, 3.
  3. πρεσβεία, Démosth., Pro Phorm., 34.
  4. Démosth., in Bœot. de nomine.