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LIVRE IV. LES RÉVOLUTIONS.

Il paraît que même sous la domination de cette aristocratie, la condition de la classe inférieure s’améliora. Car c’est alors que l’on voit clairement cette classe obtenir la possession de lots de terre sous la seule condition de payer une redevance qui était fixée au sixième de la récolte. Ces hommes étaient ainsi presque émancipés ; ayant un chez soi et n’étant plus sous les yeux du maître, ils respiraient plus à l’aise et travaillaient à leur profit.

Mais telle est la nature humaine que ces hommes, à mesure que leur sort s’améliorait, sentaient plus amèrement ce qu’il leur restait d’inégalité. N’être pas citoyens et n’avoir aucune part à l’administration de la cité les touchait sans doute médiocrement ; mais ne pas pouvoir devenir propriétaires du sol sur lequel ils naissaient et mouraient, les touchait bien davantage. Ajoutons que ce qu’il y avait de supportable dans leur condition présente, manquait de stabilité. Car s’ils étaient vraiment possesseurs du sol, pourtant aucune loi formelle ne leur assurait ni cette possession ni l’indépendance qui en résultait. On voit dans Plutarque que l’ancien patron pouvait ressaisir son ancien serviteur ; si la redevance annuelle n’était pas payée ou pour toute autre cause, ces hommes retombaient dans une sorte d’esclavage.

De graves questions furent donc agitées dans l’Attique pendant une suite de quatre ou cinq générations. Il n’était guère possible que les hommes de la classe inférieure restassent dans cette position instable et irrégulière vers laquelle un progrès insensible les avait conduits ; et alors de deux choses l’une, ou perdant cette position, ils devaient retomber dans les liens de la dure clientèle, ou décidément affranchis par un progrès nouveau,