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CH. II. LA CONQUÊTE ROMAINE.

tion de ceux qui ne l’avaient pas. Il vint un temps où les villes latines demandèrent que ce droit de cité cessât d’être un privilége. Les villes italiennes qui, soumises depuis deux siècles, étaient à peu près dans la même condition que les villes latines, et voyaient aussi leurs plus riches habitants les abandonner pour devenir romains, réclamèrent pour elles ce droit de cité. Le sort des sujets ou des alliés était devenu d’autant moins supportable à cette époque, que la démocratie romaine agitait alors la grande question des lois agraires. Or le principe de toutes ces lois était que ni le sujet ni l’allié ne pouvait être propriétaire du sol, sauf un acte formel de la cité, et que la plus grande partie des terres italiennes appartenait à la république ; un parti demandait donc que ces terres, qui étaient occupées presque toutes par des Italiens, fussent reprises par l’État et partagées entre les pauvres de Rome. Les Italiens étaient donc menacés d’une ruine générale ; ils sentaient vivement le besoin d’avoir des droits civils, et ils ne pouvaient en avoir qu’en devenant citoyens romains.

La guerre qui s’ensuivit fut appelée la guerre sociale ; c’étaient les alliés de Rome qui prenaient les armes pour ne plus être alliés et devenir romains. Rome victorieuse fut pourtant contrainte d’accorder ce qu’on lui demandait, et les Italiens reçurent le droit de cité. Assimilés dès lors aux Romains, ils purent voter au forum ; dans la vie privée, ils furent régis par les lois romaines ; leur droit sur le sol fut reconnu, et la terre italienne, à l’égal de la terre romaine, put être possédée en propre. Alors s’établit le jus italicum, qui était le droit, non de la personne italienne, puisque l’italien était devenu romain,