Page:Fustel de Coulanges - La Cité antique, 1870.djvu/297

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

la royauté nécessaire et la famille régnante inviolable. Mais il fit en sorte que les rois fussent désormais soumis au Sénat en ce qui concernait le gouvernement, et qu’ils ne fussent plus que les présidents de cette assemblée et les exécuteurs de ses décisions. Un siècle après, la royauté fut encore affaiblie et ce pouvoir exécutif lui fut ôté ; on le confia à des magistrats annuels qui furent appelés éphores.

Il est facile de juger par les attributions qu’on donna aux éphores, de celles qu’on laissa aux rois. Les éphores rendaient la justice en matière civile, tandis que le Sénat jugeait les affaires criminelles. Les éphores, sur l’avis, du Sénat, déclaraient la guerre ou réglaient les clauses des traités de paix. En temps de guerre, deux éphores accompagnaient le roi, le surveillaient ; c’étaient eux qui fixaient le plan de campagne et commandaient toutes les opérations[1]. Que restait-il donc aux rois, si on leur ôtait la justice, les relations extérieures, les opérations militaires ? Il leur restait le sacerdoce. Hérodote décrit leurs prérogatives : « Si la cité fait un sacrifice, ils ont la première place au repas sacré ; on les sert les premiers et on leur donne double portion. Ils font aussi les premiers la libation, et la peau des victimes leur appartient. On leur donne à chacun, deux fois par mois, une victime qu’ils immolent à Apollon[2]. » « Les rois, dit Xénophon, accomplissent les sacrifices publics et ils ont la meilleure part des victimes. » S’ils ne jugent ni en matière civile ni en matière criminelle, on leur réserve du moins le jugement

  1. Thucydide, V, 63. Hellanicus, II, 4. Xénophon, Gouv. de Lacéd., 14 (13) ; Helléniques, VI, 4. Plutarque, Agésilas, 10, 17, 23, 28 ; Lysandre, 23. Le roi avait si peu, de son droit, la direction des opérations militaires qu’il fallut une décision toute spéciale du Sénat pour confier le commandement de l’armée à Agésilas, lequel réunit ainsi, par exception, les attributions de roi et celles de général : Plutarque, Agéailas, 6 ; Lysandre, 23. Il en avait été de même autrefois pour le roi Pausanias : Thucydide, I, 128.
  2. Hérodote, VI, 56, 57.