Page:Fustel de Coulanges - La Cité antique, 1870.djvu/327

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amèrement ce qu’il leur restait d’inégalité. N’être pas citoyens et n’avoir aucune part à l’administration de la cité les touchait sans doute médiocrement ; mais ne pas pouvoir devenir propriétaires du sol sur lequel ils naissaient et mouraient, les touchait bien davantage. Ajoutons que ce qu’il y avait de supportable dans leur condition présente, manquait de stabilité. Car s’ils étaient vraiment possesseurs du sol, pourtant aucune loi formelle ne leur assurait ni cette possession ni l’indépendance qui en résultait. On voit dans Plutarque que l’ancien patron pouvait ressaisir son ancien serviteur ; si la redevance annuelle n’était pas payée ou pour toute autre cause, ces hommes retombaient dans une sorte d’esclavage.

De graves questions furent donc agitées dans l’Attique pendant une suite de quatre ou cinq générations. Il n’était guère possible que les hommes de la classe inférieure restassent dans cette position instable et irrégulière vers laquelle un progrès insensible les avait conduits ; et alors de deux choses l’une, ou perdant cette position ils devaient retomber dans les liens de la dure clientèle, ou décidément affranchis par un progrès nouveau ils devaient monter au rang de propriétaires du sol et d’hommes libres.

On peut deviner tout ce qu’il y eut d’efforts de la part du laboureur, ancien client, de résistance de la part du propriétaire, ancien patron. Ce ne fut pas une guerre civile ; aussi les annales athéniennes n’ont elles conservé le souvenir d’aucun combat. Ce fut une guerre domestique dans chaque bourgade, dans chaque maison, de père en fils.

Ces luttes paraissent avoir eu une fortune diverse suivant la nature du sol des divers cantons de l’Attique. Dans la plaine où l’eupatride avait son principal domaine et où il était toujours présent, son autorité se maintint à peu près intacte sur le petit groupe de serviteurs qui étaient toujours sous ses yeux ; aussi les pédiéens se montrèrent-ils générale-