Page:Fustel de Coulanges - La Cité antique, 1870.djvu/468

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Il semblerait d’après cela que les institutions municipales dussent subsister chez les vaincus, et que le monde dût être un vaste ensemble de cités distinctes entre elles, et ayant à leur tête une cité maîtresse. Il n’en était rien. La conquête romaine avait pour effet d’opérer dans l’intérieur de chaque ville une véritable transformation.

D’une part étaient les sujets, dedititii ; c’étaient ceux qui, ayant prononcé la formule de deditio, avaient livré au peuple romain leurs personnes, leurs murailles, leurs terres, leurs eaux, leurs maisons, leurs temples, leurs dieux. Ils avaient donc renoncé, non seulement à leur gouvernement municipal, mais encore à tout ce qui y tenait chez les anciens, c’est-à-dire à leur religion et à leur droit privé. A partir de ce moment, ces hommes ne formaient plus entre eux un corps politique ; ils n’avaient plus rien d’une société régulière. Leur ville pouvait rester debout, mais leur cité avait péri. S’ils continuaient à vivre ensemble, c’était sans avoir ni institutions, ni lois, ni magistrats. L’autorité arbitraire d’un praefectus envoyé par Rome maintenait parmi eux l’ordre matériel.[1]

D’autre part étaient les alliés, foederati ou socii. Ils étaient moins mal traités. Le jour où ils étaient entrés dans la domination romaine, il avait été stipulé qu’ils conserveraient leur régime municipal et resteraient organisés en cités. Ils continuaient donc à avoir, dans chaque ville, une constitution propre, des magistratures, un sénat, un prytanée, des lois, des juges. La ville était réputée indépendante et semblait n’avoir d’autres relations avec Rome que celles d’une alliée avec son alliée. Toutefois dans les termes du traité qui avait été rédigé au moment de la conquête, Rome avait inséré cette formule :

  1. Tite Live, 1, 3 8 ; VII, 31 ; IX, 20 ; XXVI, 16 ; XXVIII, 34. Cicéron, De lege agr., I, 6 ; II, 32. Festus, v° Praefecturae.