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CHAPITRE VII
Le droit de succession.


1° Nature et principe du droit de succession chez les anciens.

Le droit de propriété ayant été établi pour l’accomplissement d’un culte héréditaire, il n’était pas possible que ce droit fût éteint après la courte existence d’un individu. L’homme meurt, le culte reste ; le foyer ne doit pas s’éteindre ni le tombeau être abandonné. La religion domestique se continuant, le droit de propriété doit se continuer avec elle.

Deux choses sont liées étroitement dans les croyances comme dans les lois des anciens, le culte d’une famille et la propriété de cette famille. Aussi était-ce une règle sans exception dans le droit grec comme dans le droit romain, qu’on ne pût pas acquérir la propriété sans le culte ni le culte sans la propriété. « La religion prescrit, dit Cicéron, que les biens et le culte de chaque famille soient inséparables, et que le soin des sacrifices soit toujours dévolu à celui à qui revient l’héritage[1]. » À Athènes, voici en quels termes un plaideur réclame une succession : « Réfléchissez bien, juges, et dites lequel de mon adversaire ou de moi, doit hériter des biens de Philoctémon et faire les sacrifices sur son tombeau[2]. » Peut-on dire plus clairement que le soin du culte est inséparable de la succession ? Il en est de même dans l’Inde : « La personne qui hérite,

    d’avoir prise sur les biens du débiteur. Cela n’était pas facile ; mais la distinction que l’on faisait entre la propriété et la possession, offrit une ressource. Le créancier obtint du préteur le droit de faire rendre, non pas la propriété, dominium, mais les biens du débiteur, bona. Alors seulement, par une expropriation déguisée, le débiteur perdit la jouissance de sa propriété.

  1. Cicéron, De legib., II, 19, 20. Festus, v. everriator.
  2. Isée, VI, 51. Platon appelle l’héritier διάδοχος θεών, Lois, V, 740.