Page:Gérard - L’Ancienne Alsace à table, 1877.djvu/136

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

sénat, aux chefs des tribus, au corps des pasteurs, avaient porté le nombre des convives à 65. Les récipiendaires, qui faisaient les frais du repas, avaient fait marché avec l’hôtelier du Sauvage, le sieur Luterburg, à raison de 8 pfundstäbler (10 liv. 14 sous tournois) par tête ; 40 pfundstäbler à prendre dans le total devaient être spécialement consacrés aux vins. L’hôtelier s’engageait de ne rien faire enlever des mets servis et de les employer à un déjeuner de lendemain. On dressa cinq tables ; l’élite de la compagnie aux deux premières (Herrentische). On y présenta trois services : 1° soupe garnie d’une poule, bœuf bouilli, pâté de jeunes coqs, un dindon, un plat de légumes, un plat de choux-fleurs ; 2° rôti de veau avec son rognon, rôti de lièvre, filet de chevreuil, chapons, pigeons, bécasses, alouettes, oie, canards, compotes de poires et de prunes ; 3° deux plats de beignets, tarte, gâteau feuilleté (Spannischbrod), confitures, gaufres, oublies, et une pâtisserie nationale dont la dénomination trop libre ne peut plus être traduite en français moderne. Aux trois autres tables, l’on servit le menu suivant : 1° soupe avec poule, bouilli, pâté de veau, dindon, un plat de légumes, veau en sauce ; 2° cochon de lait, gigot de veau, jambon, rôti de lièvre, oie, canards, chapons, compotes de poires et de prunes ; 3° beignets, gâteau feuilleté, tarte, gaufres, oublies, fruits[1]. Voilà des citoyens qui entraient plus gaîment dans l’association municipale que l’on n’y entre de nos jours, où l’initiation civique se fait principalement par le percepteur.

Ces braves Mulhousiens étaient constamment comme à l’affût de toutes les occasions de banqueter. Que dis-je, de toutes les occasions, il faudrait dire de tous les prétextes ! Ils mangeaient à tort et à travers, à propos d’événements qui ne les concernaient en aucune façon. — Que leur importait, par exemple, la naissance du duc de Bourgogne, petit-fils de Louis XV, qui eut lieu en 1751 ? Étrangers à la France et indépendants chez eux, ils n’avaient

  1. Mieg, Gesch. der Stadt Mülhausen, t. II, p. 313.