Page:Gérard - L’Ancienne Alsace à table, 1877.djvu/137

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aucune raison de se réjouir sur un fait aussi indifférent. Ils le célébrèrent, au contraire, par un banquet de 60 couverts, qui réunit dans la grande salle du conseil de l’hôtel de ville le sénat, les pasteurs, les savants de la république et quelques gentilshommes du voisinage. Le menu du festin ne nous est pas parvenu. Mais l’on sait que les femmes de ces messieurs se régalèrent, à la faveur de cette circonstance, d’un bal et d’une collation à la tribu des tailleurs, et que la collation consista en pâtés froids, en craquelins aux amandes (Mandelherz), en crèmes, en croquantes, en confitures de toute espèce, et en cette pâtisserie inexpressible dont je parlais il n’y a qu’un instant[1].

Dans notre heureuse province, les malades eux-mêmes profitaient de l’indulgence et du libéralisme qui des mœurs communes avaient passé dans les théories médicales, dans les doctrines hygiéniques. Voici le régime que prescrivait, en 1783, aux malades des bains de Niederbronn, le docteur Roth, médecin de ces eaux et ancien chirurgien du roi de Pologne Auguste III et du maréchal de Saxe : « Le dîner sera composé d’un bon potage fait de bœuf, de veau, de mouton, de volaille, avec quelques racines de persil, carottes, céleri, etc. ; ensuite quelques légumes légers, une fricassée de poulets, le rôti, veau ou mouton, une crème, point de pâtisserie ou très peu, du dessert, comme biscuits, macarons, confitures, fruits en compote, du bon vin vieux ordinaire trempé d’eau commune ; ceux qui désireront un vin étranger, de Bourgogne ou d’Espagne, pourront en prendre modérément. Le souper sera un bon potage (riz, orge, semoule ou vermicelle), un rôti, quelques légumes légers et le dessert comme à dîner[2]. » Peste ! quel régime facile et quel médecin accommodant ! Je comprends maintenant l’ancienne réputation des eaux de Niederbronn.

J’aurais aimé de clore ce chapitre par des renseignements certains

  1. Mieg, loc. cit., t. Ier, p. 309.
  2. Rtoh, Analyse des eaux de Niederbronn, p. 57.