Puisque nous sommes dans la véritable antiquité, ne la quittons point sans remarquer que nous tenons de la même époque et de la même source les boulettes de fromage (Kæsknöpfle), vieux mets alsacien que nos voisins du pays de Bade nomment aussi Kæsspatzen. Ce sont les globi des Romains de la troisième guerre punique.
J’ignore à quel degré de la nuit des âges les Belfortains rapportent un mets qui jouit dans leur pays d’une grande autorité. La pierre de la Miotte est un monument romain ou un vestige bourguignon, on peut choisir ; mais le roncin, le mets en question, qu’est-il ? Est-il romain, bourguignon, ou tout simplement belfortain ? Voilà ce que l’on ne décide point. Un brave homme d’historien l’a signalé récemment comme un mets du pays, qui a « l’avantage d’être copieux, friand et économique[1] ». Diantre ! cette enseigne promet beaucoup. Approchons et voyons ce qu’elle tiendra. « C’est un mélange, continue l’auteur, de lait, de sucre, de farine et d’œufs battus en consistance de bouillie, auquel on ajoute soit des quartiers de pommes, soit des prunes ou des pruneaux, des cerises ou des baies de myrtilles, suivant le goût ou la saison. Cette composition culinaire se met dans un plat ou dans un poëlon préalablement enduit de beurre frais. Cuit dans un four ou entre deux feux, dessus et dessous, ce gâteau se gonfle énormément. On appelle cette robuste pièce de pâtisserie bourgeoise un roncin. » C’est bien dit. Voilà le roncin connu et tout le monde, je l’espère, satisfait.
C’est aussi dans le paragraphe des œufs qu’il convient de placer l’ancienne soupe au vin. L’on battait une bonne quantité d’œufs qu’on jetait dans du vin le meilleur possible ; on versait cette préparation sur de petits dés de pain grillé, et l’on tournait sur un feu doux jusqu’à la cuisson, en ajoutant du sucre, de la cannelle et du safran ; puis on dressait ce potage sur des tranches de pain
- ↑ Corret, Histoire de Belfort, p. 121.