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Page:Gérard - L’Ancienne Alsace à table, 1877.djvu/204

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les voyageurs. Vers la fin du seizième siècle, quand Montaigne fit son voyage d’Allemagne (1580), il trouva les prix un peu haussés. « Les hostes, dit-il, comptent communément le repas à 4, 5 ou 6 baz pour table d’hoste[1] » ; ce qui revient à 24, 30 et 36 sous de notre temps.

Le tarif des dépenses d’hôtellerie subit aux dix-septième et dix-huitième siècles une progression ascendante qui correspondait à la diminution successive de la valeur de l’argent. Ainsi, j’ai sous les yeux le règlement des dépenses de table des hostelleries de Colmar, en 1789, signé du syndic Chauffour. La table d’hôte était à 36 sols aux Six Montagnes noires, aux Trois Rois, à la Pomme d’or, à la Poste, au Bœuf, à l’Arbre vert, au Roi de Pologne, au Canon d’or ; elle n’était que de 30 sols aux Deux Clefs, à l’Ange, à la Couronne, à la Fleur, au Cheval blanc, à la Ville de Strasbourg, au Soleil, au Saint-Christophe, à la Ville de Belfort ; et de 20 sous à l’Aigle et à la Fleur de lis ; — Arcades ambo. — Dans chaque auberge, il y avait, en outre, une seconde table où l’on payait un peu moins.

En regard de ces éléments d’appréciation des conditions économiques de la vie d’autrefois, il faut replacer quelques indications d’ensemble que j’ai disséminées dans le cours de mon travail, et qui concourent à démontrer que les dépenses alimentaires pèsent plus lourdement sur les générations actuelles que sur celles des temps passés. L’on se rappelle que dans un séjour que Turenne fit à Saverne, en 1645, avec une suite de quinze hommes, il ne dépensa, en quatre jours, que 67 livres 17 sols et 4 deniers, moins de 200 fr. de notre monnaie. — Le festin de bienvenue donné par la ville de Montbéliard au comte Henri de Wurtemberg, en 1478, ne coûta que 8 florins et 8 gros blancs, qui représentent environ 180 fr. d’aujourd’hui. — Les frais de réception et d’entretien des députés suisses à Mulhouse, en 1515, pendant quatre jours, ne s’élevèrent qu’à 53 florins, ce qui équivaut à 540

  1. Journal du voyage de Montaigne, t. Ier, p. 72.