Page:Gérard - L’Ancienne Alsace à table, 1877.djvu/304

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épices étaient du safran, de la cannelle, du fenouil, de l’anis, de la muscade, du cumin, etc., dont chacun usait pour assaisonner la viande selon son goût. J’ai oublié de dire qu’aux quinzième et seizième siècles on se servait aussi de cuillers de bois à manche d’argent et que le Hortus deliciarum d’Herrad de Landsperg nous montre, au douzième siècle, des salières, des couteaux de table à manche d’ébène, des fourchettes à deux pointes ; mais ces objets ne sont destinés qu’au service général de la table ; les convives n’en sont point pourvus ; l’absence des cuillers est digne de remarque[1].

Je n’ai point trouvé de traces anciennes de l’huilier, qui ne peut être qu’une importation française, puisqu’il conserve encore dans l’Allemagne sa dénomination gauloise.

Je ne dirai qu’un mot du linge de table. Les Alsaciens ont toujours été très orgueilleux sur ce sujet. L’usage en est général dans la province, même chez les paysans et chez les pauvres, ce qui ne se voit pas communément en France. L’on faisait anciennement beaucoup de toile dans le pays ; les foires de Hatten étaient renommées pour ce commerce[2].

Saverne et Haguenau expédiaient leurs belles toiles en Suisse, déjà au quatorzième siècle[3]. Le linge de table de Giromagny était l’objet d’un commerce étendu avec la Lorraine, la Suisse et le Comté. On voit déjà figurer dans le Hortus de Herrad des nappes ou plutôt des tapis blancs à raies ou à carreaux jaunes, et d’autres tapis entièrement blancs ; une charte de 1340, relative aux droits de l’évêque de Bâle à Sierentz, nous informe que les cours colongères devaient fournir au prélat, lors de ses séjours, outre la vaisselle, des nappes blanches (Tischlachen) ; les bangards étaient chargés de les rendre en bon état de propreté « afin qu’on les prête d’autant plus volontiers[4] ».

  1. Engelhardt, Herrad von Landsperg, p. 98.
  2. Herzog, Chronick, 3e partie, ch. xviii.
  3. Basel im vierzehnten Jahrhundert, p. 327.
  4. Trouillat, Monuments de l’évêché de Bâle, t. III, p. 512.