hourra qui retentit dans toute la forêt, que le sucre était cuit ! La chaudière fut aussitôt enlevée du brasier et déposée sur des branches de sapin où on la laissa refroidir lentement, tout en agitant et brassant le contenu au moyen d’une palette ou mouvette de bois ; puis le sucre fut vidé dans des moules préparés d’avance.
On en fit sortir, quelques moments après, plusieurs beaux pains de sucre, d’un grain pur et clair.
Ce résultat fit grandement plaisir à Jean Rivard. Outre qu’il était assez friand de sucre d’érable, — défaut partagé d’ailleurs par un grand nombre de jolies bouches, — il éprouvait une satisfaction d’un tout autre genre : il se trouvait, à compter de ce jour, au nombre des producteurs nationaux ; il venait d’ajouter à la richesse de son pays, en tirant du sein des arbres un objet d’utilité publique qui sans son travail y serait resté enfoui. C’était peut-être la plus douce satisfaction qu’il eût ressentie depuis son arrivée dans la forêt. Il regardait ses beaux pains de sucre avec plus de complaisance que n’en met le marchand à contempler les riches étoffes étalées sur les tablettes de sa boutique.
Du moment que Jean Rivard fut en état de se charger de la surveillance de la chaudière, Pierre Gagnon consacrait la plus grande partie de son temps à courir d’érable en érable pour recueillir l’eau qui découlait chaque jour dans les auges. C’était une rude besogne dans une sucrerie non encore organisée et où tous les transports devaient se faire à bras.
Pierre cependant s’acquittait de cette tâche avec sa gaîté ordinaire, et c’était souvent au moment où