— Tout juste, une jolie ville aux rues bien propres, arrosée par des ruisseaux d’eau courante. Le Cantal est un département pauvre ; ses habitants sont souvent obligés d’émigrer, comme on fait en Savoie, pour aller gagner leur vie ailleurs : ils se font portefaix, charbonniers, et souvent chaudronniers. Le métier de chaudronnier est un de ceux que les Auvergnats préfèrent, et Aurillac est un des grands centres de la chaudronnerie. Mais, petit Julien, puisque tu es savant en géographie, sais-tu ce que c’est que le Cantal ?
— Oh ! dame, monsieur Gertal, je ne sais pas tant de choses, moi ; mais je pense que cela doit être une rivière, comme l’Allier que j’ai vu à Moulins.
— Allons donc ! c’est une montagne. Le Plomb du Cantal a près de 1.900 mètres de hauteur, il y a de la neige sur le sommet une bonne partie de l’année. Pour moi, je n’oublierai jamais le Cantal, vois-tu, parce que j’y suis monté.
— Vraiment, monsieur Gertal ? Est-ce que c’est difficile d’aller là comme au mont Blanc ?
— Oh ! non, certes ; seulement l’orage nous prit au haut : il pleuvait à verse, il soufflait un vent effroyable, et il n’y avait qu’un petit bout de rocher abrupt pour tout abri ; l’orage dura quatre heures, et nous avons grelotté tout le temps sur ce sommet, mes amis et moi.
— Oh ! dit Julien, moi, je serais descendu bien vite en courant pour me réchauffer.
— Toi, petit, tu aurais dû faire comme les camarades, attendre. Quand un brouillard ou une pluie couvre les montagnes du Cantal, si l’on est au sommet, il faut bon gré mal gré y rester jusqu’à la fin, ou risquer des chutes dangereuses. On voit au-dessous de ses pieds une mer de nuages noirs