Page:G. Bruno - Le Tour de la France par deux enfants, 1904.djvu/147

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— Aide-toi de mes bras, Jean-Joseph, dit-il d’une voix calme ; descends sur mes épaules et n’aie pas peur.

Jean-Joseph s’assit sur la lucarne, puis se laissa glisser le long du mur jusqu’à ce que ses pieds touchassent le dos d’André. Une pluie d’étincelles jaillissait autour d’eux, le barreau consolidé fléchissait encore sous son double poids ; la position était si périlleuse que les spectateurs de cette scène fermèrent un instant les yeux d’épouvante. — Mon Dieu ! disait le petit Julien agenouillé à quelques pas et joignant les mains avec angoisse, mon Dieu ! sauvez-les.

Quand André sentit Jean-Joseph sur ses épaules, il le fit glisser dans ses bras, par devant lui ; puis il le posa sur le second barreau de l’échelle : — Descends devant à présent, lui dit-il, et prends garde au barreau cassé dans le milieu.

Jean-Joseph descendit rapidement, André à sa suite. Ils arrivaient à peine au dernier tiers de l’échelle qu’un bruit se fit entendre. Une partie du toit s’effondrait ; des pierres détachées du mur roulèrent et vinrent heurter l’échelle, qui s’affaissa lourdement.

Un cri de stupeur s’échappa de toutes les bouches ; mais, avant même qu’on eût eu le temps de s’élancer, André était debout. Il n’avait que de légères contusions, et il relevait le petit Jean-Joseph, qui s’était évanoui dans l’émotion de la chute.


Quand l’enfant revint à lui, il était encore dans les bras d’André. Celui-ci, épuisé lui-même, s’était assis à l’écart sur une botte de paille.

Le premier mouvement du petit garçon fut d’entourer de ses deux bras le cou du brave André, et le regardant de ses grands yeux effrayés qui semblaient revenir de la tombe, il lui dit doucement : — Que vous êtes bon !

Puis il s’arrêta, cherchant quel autre merci dire encore à son sauveur et quoi lui offrir ; mais il songea qu’il ne possédait rien, qu’il n’avait personne au monde, ni père, ni mère, ni frère, qui pût remercier André avec lui, et il soupira tristement.

— Jean-Joseph, dit André, comme s’il devinait l’embarras de l’orphelin, c’est parce que je sais que tu es si seul au monde que j’ai trouvé le courage de te sauver. À ton tour,