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ARMINIUS,
Non, non, arminius a perdu la clarté,
Puisque son Hercinie est en captivité.
Je ne suis qu’un esclave, et qu’une âme trop basse,
Indigne de ce nom, digne de ma disgrâce ;
Et sans chercher d’excuse, en accusant le sort,
Si vous êtes captive, il faut que je sois mort.
Mais hélas la douleur dont mon âme est suivie,
Fait voir qu’en vous perdant, j’ai conservé la vie ;
Et tous ces pavillons, où l’aigle se fait voir,
Me montrent mon malheur, et mon peu de pouvoir.
Oui, je vis Hercinie, et je vis avec honte ;
L’ennemi me dompta, le désespoir me dompte ;
Je devais comme un foudre, et voler, et courir ;
Je devais en un mot, vous sauver, ou mourir.
Aussi ne viens-je ici, dans le mal qui m’accable,
Qu’avec les sentiments d’un cœur faible et coupable ;

Il entend les vœux d’Hercinie.

Et s’il ne s’agissait de regarder mes dieux,
Dans ma confusion, j’abaisserais les yeux.
HERCINIE.
Que dites-vous seigneur ? Perdez-vous la mémoire,
Que rien dans l’univers n’égale votre gloire ?
Que cet illustre cœur, et cette illustre main,
Ont fait cent fois trembler tout l’empire romain ?
Et que ses légions, dans nos guerres passées,
Par ce bras indomptable, ont été renversées ?