Page:G. Scudéry - Arminius ou les Frères ennemis - 1644.djvu/70

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TRAGI-COMÉDIE.
Qu’on y vit mille fois, et mille, sous vos pas,
Tomber aigle sur aigle, et soldats sur soldats ?
Et que des bords du Rhin, jusqu’aux bords maritimes,
Roulaient parmi les flots, de sanglantes victimes ?
Non, non, si les romains ont triomphé de moi,
ce fut quand votre bras portait ailleurs l’effroi.
Ils doivent cet honneur, non pas à leur puissance,
Non pas à leur valeur, mais bien à votre absence
Partout ou vous courez, la victoire vous suit,
Et d’où vous n’êtes pas, la victoire s’enfuit :
Ainsi consolez-vous, dedans cette infortune,
Et croyez pour le moins, qu’elle nous est commune.
ARMINIUS.
Et quoi chère Hercinie, et quoi donc, ce grand cœur,
N’aurait-il point suivi, le parti du vainqueur ?
Et l’heureux Flavian, en faisant voir sa flamme,
N’a-t-il point eu l’honneur de rentrer dans votre âme,
Et soit comme un guerrier, et soit comme un amant,
N’a-t-il point en ce jour triomphé doublement ?
HERCINIE.
Seigneur, à ce discours j’ai raison de me plaindre
ARMINIUS.
Songez qu’un malheureux a sujet de tout craindre.