Page:Gaboriau - L’Affaire Lerouge.djvu/432

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

le cœur endurci d’un assassin. Et toujours la conclusion était qu’il serait sage d’avouer. Mais il prodigua sa rhétorique absolument comme le père Tabaret avait prodigué la sienne, en pure perte. Albert ne paraissait aucunement touché, ses réponses étaient d’un laconisme extrême. Il commença et finit de même que la première fois en protestant de son innocence.

Une épreuve qu’on a vu souvent donner des résultats restait à tenter.

Dans cette même journée du samedi, Albert fut mis en présence du cadavre de la veuve Lerouge. Il parut impressionné par ce lugubre spectacle, mais non plus que le premier venu forcé de contempler la victime d’un assassinat quatre jours après le crime. Un des assistants ayant dit :

— Ah ! si elle pouvait parler !

Il répondit :

— Ce serait un grand bonheur pour moi.

Depuis le matin, M. Daburon n’avait pas obtenu le moindre avantage. Il en était à s’avouer l’insuccès de sa comédie, et voilà que cette dernière tentative échouait. L’impassible résignation du prévenu mit le comble à l’exaspération de cet homme si sûr de son fait. Son dépit fut visible pour tous, lorsque, quittant subitement son patelinage, il donna durement l’ordre de reconduire le prévenu en prison.