Page:Gaboriau - L’Affaire Lerouge.djvu/431

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celle dont la vie était suspendue à la sienne ? Que fallait-il pour cela ? Un mot. Alors il serait, sinon libre, du moins rendu au monde, la prison deviendrait un séjour habitable, plus de secret, ses amis le visiteraient, il recevrait qui bon lui semblerait.

Ce n’était plus le juge qui parlait, c’était un père qui pour son enfant garde quand même au fond de son cœur des trésors d’indulgence.

M. Daburon fit plus encore. Il voulut, pour un moment, se supposer à la place d’Albert. Qu’aurait-il fait après la terrible révélation ? C’est à peine s’il osait s’interroger. Il comprenait le meurtre de la veuve Lerouge, il se l’expliquait, il l’excusait presque. Autre traquenard. C’était certes un crime énorme, mais qui ne révoltait ni la conscience ni la raison. C’était un de ces crimes que la société peut, sinon oublier, du moins pardonner jusqu’à un certain point, parce que le mobile n’a rien de honteux. Quel tribunal ne trouverait des circonstances pour une heure de délire si compréhensible ? Puis, le premier, le plus grand coupable n’était-il pas le comte de Commarin ? N’était-ce pas lui dont la folie avait préparé ce terrible dénoûment ? Son fils était victime de la fatalité, et il fallait surtout le plaindre.

Sur ce texte, M. Daburon parla longtemps, cherchant les choses les plus propres, selon lui, à amollir