Page:Gaboriau - L’Affaire Lerouge.djvu/550

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de l’argent que Noël aurait tué la femme Lerouge. Oh ! alors il serait le dernier, le plus infâme des hommes. Quel monstre de dissimulation et d’hypocrisie ! Et penser que si je mourais ici de fureur, il serait mon héritier ! Car c’est écrit en toutes lettres : « Je lègue à mon fils Noël Gerdy… » Si ce garçon était coupable, il n’y aurait pas d’assez grands supplices pour lui… Mais cette femme ne rentrera donc pas !

Cette femme n’était pas pressée, le temps était beau, sa toilette était ravissante, elle se montrait. Elle visita trois ou quatre magasins encore, et en dernier lieu s’arrêta chez un pâtissier, où elle resta plus d’un quart d’heure.

Le bonhomme, dévoré d’angoisses, bondissait et trépignait dans sa voiture.

Être séparé du mot d’une énigme terrible par le caprice d’une drôlesse, quelle torture ! Il mourait d’envie de s’élancer sur ses pas, de la prendre par le bras et de lui crier :

— Rentre donc, malheureuse, rentre donc chez toi ! Que fais-tu là ? Ne sais-tu pas qu’à cette heure ton amant, celui que tu as ruiné, est soupçonné d’un assassinat ! Rentre donc que je te questionne, que je sache de toi s’il est innocent ou coupable ! Car tu me le diras, sans t’en douter. Je t’ai préparé un traquenard où tu te prendras. Rentre donc, l’anxiété me tue.