Page:Gaboriau - L’Affaire Lerouge.djvu/71

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à lire, qu’elle a poussé un grand cri, un cri horrible. Nous sommes accourus, madame était tombée sur le tapis, comme morte. M. Noël l’a prise dans ses bras et l’a portée dans sa chambre. Je voulais aller chercher le médecin, monsieur m’a dit que ce n’était pas la peine, qu’il savait ce que c’était.

— Et comment va-t-elle, maintenant ?

— Elle est revenue. C’est-à-dire je le suppose, car M. Noël m’a fait sortir. Ce que je sais, c’est que tout à l’heure elle parlait, et très-fort même, car je l’ai entendue. Ah ! monsieur, c’est tout de même bien extraordinaire !…

— Quoi ?

— Ce que madame disait à monsieur.

— Ah ! ah ! la belle, ricana le père Tabaret, on écoute donc aux portes ?

— Non, monsieur, je vous jure, mais c’est que madame criait comme une perdue, elle disait…

— Ma fille ! dit sévèrement le père Tabaret, on entend toujours mal à travers une porte, demandez plutôt à Manette.

La servante, toute confuse, voulut se disculper.

— Assez ! assez ! fit le bonhomme. Retournez à votre ouvrage. Il est inutile de déranger M. Noël, je l’attendrai très-bien ici.

Et, satisfait de la petite leçon qu’il venait de donner, il ramassa le journal et s’installa au coin du feu, déplaçant la bougie pour lire plus à son aise.